Comment la France a géré la transition énergétique ?

Comment la France a géré la transition énergétique ?

En quelques années seulement l’écologie est passée du statut de sujet réservé aux doux rêveurs à celui de passerelle politique pour devenir enfin un problème international sérieux. Il était plus que temps. Même si la planète subit des changements climatiques cycliques, il est désormais parfaitement prouvé que les activités humaines, notamment celles liées au marché électricité sont un facteur nettement aggravant. Malgré quelques pays, souvent les plus gros pollueurs, qui campent sur des postures de déni, les pays du monde entier ont pris conscience de l’accélération brutale de la dégradation de notre biosphère. Seule une transition énergétique menée à bien dans des délais raisonnables, mais efficaces peut ralentir puis faire reculer la situation préoccupante que traverse la Terre au niveau de son écologie. La France a sa propre politique de transition énergétique. Grâce à des mesures gouvernementales strictes, elle compte bien rejoindre le concert des nations pour y tenir une place de premier plan.

Une action gouvernementale démarrée en 2012

La prise en main du dossier de la transition énergétique par le gouvernement français date du premier semestre 2012. C’est une conséquence immédiate au Sommet de Rio qui a su éveiller de nombreuses consciences politiques. Les décideurs politiques et autres y ont également perçu un facteur de développement non négligeable grâce à la “Croissance verte”. En effet, de nombreux chantiers qui seront nécessaires à la mise en place de la transition énergétique seront générateurs d’emplois comme de profits. Néanmoins la France pose d’emblée un problème avec un fournisseur électricité directement piloté par l’état et qui repose en majorité sur la génération d’énergie par l’exploitation de centrales nucléaires. Cette spécificité européenne et même mondiale pose des problèmes aussi bien financiers que techniques. Les budgets qui devront être alloués au démantèlement des centrales nucléaires sont de loin les plus conséquents comparés à ceux nécessaires aux travaux à la démolition d’autres types de centrales. C’est pour cela que le gouvernement français a décidé de procéder par étapes. Un débat national sur la transition énergétique se tiendra à horizon 2025/2050) et sera suivi d’une loi sur la transition énergétique. Celle-ci visera à la fois le passage à une distribution électrique utilisant des énergies plus propres et à la réduction des émissions à effet de serre.

Entamer un grand débat national

Le grand débat national vise non seulement à relever le défi énergétique, mais aussi celui soulevé par les forts changements climatiques. Même si le nucléaire en France n’est pas directement en cause la volonté affichée des pouvoirs publics est de faire d’une pierre deux coups pour sensibiliser la population à ces problématiques intimement liées. Chez le distributeur électrique français EDF/GDF, le débat est déjà largement entamé. Malgré une nette baisse du prix du pétrole, les nombreuses fermetures de centrales nucléaires lui ont vite fait prendre conscience de l’importance de la transition énergétique. Il en va de sa survie même en temps que groupe. Les projets solaires, éoliens et hydroélectriques se multiplient. En seulement un an, l’énergie fournie par des moyens renouvelables a doublé. Pour le solaire seulement, on constate une progression de plus de 60% en moins de 5 ans, le photovoltaïque passant d’ailleurs cette année devant l’éolien en termes de volume d’énergie fourni.

Les spécificités françaises

La compagnie d’électricité française EDF, exploite de nombreuses centrales nucléaires. En fait, environ 60 à 80%, selon le régime d’activité, des ressources électriques nationales proviennent de la fission de l’atome. Cette spécificité toute française pose plusieurs problèmes de taille. Il est très coûteux de décommissionner une centrale atomique et encore plus de la remplacer. Les quantités phénoménales d’énergie qui y sont produites nécessitent des contreparties tout aussi phénoménales en termes d’installations aux normes de la transition énergétique. Certes on peut faire le pari d’économiser l’électricité. Cela semble être difficile au vu de la multitude de nouveaux équipements dont se dotent de plus en plus de foyers. Il faut surtout penser aux produits de fission dont le stockage n’est pas totalement maîtrisé et qui nécessitent des budgets qu’on ne sait pas encore évaluer. Leur maintien se prolongera d’ailleurs sur plusieurs milliers d’années. Le cas de la transition énergétique française est donc atypique. Elle risque donc d’être plus longue et bien plus coûteuse que pour les autres pays, notamment de l’Union Européenne.

Voter la loi de la transition énergétique

Depuis 2013 le Conseil National de la Transition Écologique est chargé de définir une loi qui permettra la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elle visera aussi à l’amélioration de l’efficacité énergétique et à la réduction de 50 % de la consommation énergétique avant 2050. Une réduction de 30 % de la consommation de combustible fossile à l’horizon 2030 devrait être atteinte. Le mix électrique devrait être plus diversifié avec une réduction de la part du nucléaire à 50 % à l’horizon 2025 au profit des énergies renouvelables. Le service électricité pourra-t-il être conservé en l’état ou devra-t-on adopter un nouveau tarif réglementé électricité ? Il est très difficile de l’établir à l’heure actuelle. On devra peut-être revoir le rôle monopolistique de l’opérateur électricité. Cette démarche est d’ailleurs en place pour favoriser la distribution par plusieurs autres acteurs ainsi que la revente des productions individuelles. Tout ceci entre dans un plan plus vaste de fonctionnement du réseau électrique en mode grid. Certains pays comme les États-Unis d’Amérique sont très en avance en la matière. Peut-être devrons-nous également revoir notre façon de penser la consommation d’énergie dans son ensemble. Ce sera de plus en plus une ressource à partager avec nos voisins, au moins européens. Souscrire à l’électricité en passant par un réseau national ne sera plus une panacée. La transition énergétique en France devra certainement s’accommoder de plusieurs réseaux raccordés à la grille nationale. Il n’y aura pas que l’électrification rurale qui sera alors décentralisée. On peut penser que dans les villes françaises intelligentes du futur chaque bâtiment, chaque quartier et chaque établissement commercial ou industriel sera fournisseur d’énergie électrique. Cela limitera la consommation, l’entretien de coûteuses installations et cela favorisera la résilience du réseau. Ne parlons même pas des équipements alternatifs de production d’énergie qui seront disposés sous les routes ou dans les vêtements. La transition énergétique sera sans doute de déporter la génération au plus près de ce qui la consomme. Ce n’est plus de la science-fiction, mais bien des faits scientifiques.